Au temps des Mérovingiens, en l’an 673, apparaît pour la 1re fois le nom « HAIMBECHA » dans un acte de donation pour désigner un hameau situé sur le coteau ensoleillé de la vallée de la Senne.

C’est d’ailleurs au cours de ce 7e siècle que Saint Landry serait venu prêcher l’évangile dans cette région. Plus tard, les 2 abbayes qui étaient devenues propriétaires des lieux y fondèrent 2 paroisses, l’une à Neder-Heembeek qui desservait la partie Est du territoire et l’autre à Over-Heembeek pour desservir la partie Ouest.

En 1814, Napoléon décida de réunir Neder et Over-Heembeek en une seule entité, d’où ce nom alambiqué que nous connaissons aujourd’hui, mais par contre les 2 paroisses continuèrent malgré tout à fonctionner jusqu’en 1935 avec l’esprit de clocher qui y était immanquablement lié. Cet ensemble s’étendait entre le canal, la Tour Japonaise et la rue De Wand actuelle, mais par la suite l’appétit domanial du roi Léopold II réduisit ce territoire d’une large bande de terres dans le but d’agrandir son domaine. Et enfin en 1921, la ville de Bruxelles annexa Neder-Over-Heembeek, ce qui permit à ses habitants de sortir quelque peu de leur isolement et par la suite même d’être relié au centre par une ligne de tram n° 47.

Cette ouverture permit à la population, essentiellement composée de jardiniers et de journaliers, peinant durement pour vivre, de se faire connaître et d’acquérir ainsi une réelle renommée pour la culture de fleurs. Toute la région se couvrit de serres, mais la guerre de 1940 marqua le déclin de cette renaissance. Dans les siècles passés, la renommée de NOH reposait sur l’existence de 2 moulins, l’un à vent à l’endroit de la Tour Japonaise actuelle et l’autre à eau dans le creux près de la rue Lombartzijde actuelle. Il existait à ce moment plusieurs grosses fermes et même un château nommé Beyaert, mais il n’en reste aujourd’hui qu’un seul vestige: la ferme de la rue Beyseghem habitée jusqu’en 2005 et rachetée par la ville en 2009.

Les difficultés de la vie des habitants étaient noyées dans bon nombre d’auberges, on en dénombra jusqu’à 110 à NOH. De nombreuses distractions populaires étaient animées par la fanfare De Eendracht à OH et àNH par l’harmonie St Lendrik qui accompagnaient processions (au moins 6/an) et kermesses préparées dans un esprit de défi entre les 2 paroisses. Dans ce contexte, il faut aussi rappeler l’existence de la guilde St Sebastiaan des tireurs à l’arc, vieille de plus de 500 ans, car elle marqua également la vie de NOH; son origine semble remonter à une espèce de gardiens-citoyens qui s’étaient organisés pour assurer la protection du village.

Toute la vie des habitants était rythmée par les églises des 2 paroisses; celle de NH était dédiée à St Pierre et celle d’OH à St Nicolas. La première d’entre elles fut construite au 10e ou 11e siècle sur les ruines d’une petite église en bois du 8ème siècle; elle fut malheureusement foudroyée en 1932, de sorte qu’il n’en reste aujourd’hui que la tour romane restaurée.  Au devant de celle-ci, on peut encore admirer le bâtiment du Kluis (1487) destiné à fournir un habitat à 5 vieillards nécessiteux originaires de NOH. L’autre église de OH repose sur des vestiges probablement encore plus anciens que la précédente; elle resta opérationnelle jusqu’en 1935, après qu’une nouvelle église réunissant les 2 paroisses eut été construite sur la place Peter Benoît.

La vie religieuse de NOH est encore marquée actuellement par le pélérinage annuel du 1er samedi de mai à Scherpenheuvel. Initialement, il s’agissait de parcourir à pied les 52 km à l’aller et les 52 km du retour, mais aujourd’hui seuls quelques braves le font encore à pied, tandis que d’autres s’y rendent également mais en usant de moyens de transport motorisés.

NOH et le canal

En 1561, l’ouverture du canal qui borde NOH sur son flanc Sud ainsi que le tracé de la chaussée reliant Bruxelles à Malines eurent de sérieuses incidences sur ce coin de campagne.

Petit à petit s’y établirent de prestigieuses maisons de campagne agrémentées de parcs, d’étangs et de fontaines, dont les plus connues portaient les noms de Marly, de Meudon et de Versailles. Puis vinrent s’y accoler plusieurs auberges pour accueillir les bourgeois de Bruxelles qui y venaient en promenade.

Le développement de cette nouvelle animation n’interférait que très peu avec la vie intérieure du village si ce n’est qu’elle offrait quelques possibilités d’emploi comme gens de maison.

Après la 1ère guerre mondiale, cette zone s’industrialisa avec la construction de la ‘Brasserie du Marly’ qui s’était spécialisée dans des bières à haute fermentation parmi lesquelles se trouvait la Christmas; elle produisait aussi une eau minérale connue sous le nom de Meudon à partir des sources de NOH. Cette brasserie, après être passée d’un propriétaire à l’autre, cessa ses activités en 1981.

Une autre industrie lourde s’installa aussi à cette époque le long du canal: les Cockeries du Marly et les Produits Chimiques qui fonctionna jusqu’en 1993. Le premier pont de Buda, destiné à relier cette industrie au Chemin de fer, date également de cette époque, mais sa structure actuelle n’existe que depuis 1955, car au début de la guerre 40-45, il fut dynamité par les Anglais. Cette industrialisation de la zone du canal offrit de nombreux postes de travail aux Heembekois.

Les seigneurs de Heembeek

La construction du château Meudon sur la colline qui descendait de l’actuelle rue des Faînes jusqu’au canal  date plu ou moins de  1764.  Ses propriétaires successifs  cherchèrent constamment à embellir cette propriété, mais ce fut un certain notaire nommé ‘de Ro’ qui lui attribua un lustre particulier en aménageant un parc majestueux avec des étangs en cascade dévalant du haut de la colline, des fontaines, une orangerie, une habitation pour les jardiniers, plusieurs serres et des annexes. Aujourd’hui, de toute cette splendeur, ne subsiste qu’un petit pavillon en ruine au bord de la route qui longe le canal et une partie du parc que la ville de Bruxelles a réaménagé en 1982. Ce château servit à de nombreuses rencontres féeriques de la noblesse, mais les Heembeekois ne furent pas complètement oubliés puisque des distributions de prix des écoles furent organisées dans l’orangerie et par beau temps, les écoliers apprirent à nager dans les étangs de la propriété. Malheureusement, en 1931, tout cet ensemble fut rasé et une partie des terrains vendus à la firme Shell.

Non loin du château Meudon, au haut de l’avenu des Croix de Guerre, au lieu-dit ‘den Dries’, se trouvait un autre petit château dont la particularité repose sur le fait qu’au 17e siècle le fameux alchimiste Jean-Baptiste Van Helmont y a séjourné de même que plus tard au début du 19e siècle le futur pape Léon XIII. Il existait aussi un petit château connu comme le ‘Château des Roses’ situé sur la colline entre l’actuelle rue Léon XIII et l’avenue des Croix de Guerre, mais il n’en reste plus aucun vestige.

Les écoles de NOH

En 1880, les propriétaires du château Meudon offrirent un terrain situé le long de la rue Léon XIII actuelle qui, à l’époque, n’était qu’un petit chemin reliant OH à NH et y firent construire un couvent de sœurs avec 2 classes afin d’assurer une éducation convenable pour les filles, les garçons n’ayant d’autre choix que l’école communale areligieuse.

C’est ainsi que débuta l’enseignement catholique à NOH; les sœurs de Vorselaar y inscrivirent immédiatement 80 élèves.

Vinrent ensuite s’y ajouter une classe gardienne, suivie année après année de plusieurs autres classes et ce n’est qu’en 1928 que cette école s’ouvrit aux garçons. L’enseignement y était prodigué en flamand, mais certaines leçons y étaient données en français; ce n’est qu’en 1962 que cette école fut scindée en 2 entités suivant le rôle linguistique.

L’urbanisation de NOH

L’annexion de NOH à la ville de Bruxelles et sa liaison au centre grâce à la nouvelle ligne de tram marqua le début d’une nouvelle ère pour la population de NOH. Celle-ci auparavant repliée sur elle-même trouva de nouveaux débouchés, sa jeunesse eut de meilleures occasions d’étudier et de s’ouvrir au monde. De cette époque date aussi l’érection d’une gigantesque église avec ses 2 tours symbolisant les 2 paroisses antérieures, même sa technique de construction en béton était d’avant-garde. Vint aussi, à l’initiative de la paroisse, la mise en service  en 1929  de la  salle Familia qui permit le déploiement d’une vie culturelle et l’ouverture d’une salle de cinéma. Ce fut d’ailleurs la 1ère salle dans tout Bruxelles et ses environs à être sonorisée pour la projection des films. Un autre signe d’ouverture fut la concurrence impitoyable que se livrèrent ce 1er cinéma et une nouvelle salle attenante au café ‘De Regenboog’ non soumise elle à la supervision du curé de l’endroit.

Outre le cinéma, cette salle Familia fut aussi utilisée pour des fêtes scolaires, des concerts, du théâtre et des expositions. Elle fut même le port d’attache du Chiro, un mouvement de jeunesse catholique établi dans toute la Flandre, mais pratiquement développé au départ de cette expérience heembeekoise, c’est d’ailleurs ici que furent créés les premiers uniformes de ce mouvement. Au départ, il s’agissait d’un mouvement réservé aux seuls garçons, mais en 1952, un Chiro pour filles vit également le jour ici à NOH.

Comme souvenir de la guerre, outre le dynamitage du pont de Buda en 1940, il faut aussi rappeler le bombardement de la rue Wimpelberg et de ses environs au 1er mai 1944 par l’aviation alliée  qui visait  en fait  la gare de formation de Schaerbeek  mais qui malencontreusement rata sa cible.

Fin d’une période et début d’une nouvelle histoire.

Ce cortège d’images du passé de NOH débutait par le souvenir de ces 2 villages isolés mais fermement accrochés à l’entour de leurs clochers sur un flanc de la colline bordant la Senne. Il s’est alors poursuivi par le développement de la zone au bas de cette colline grâce au creusement du canal avec l’érection de plusieurs villas et châteaux de campagne ainsi que l’ouverture de plusieurs auberges, pour aboutir finalement à son industrialisation.

Au siècle passé, NOH fut littéralement aspiré par la modernisation; son urbanisation a effacé nombre de vestiges de son riche passé, il n’en subsiste que très peu, mais on peut encore le retrouver cachés sous le nom de certaines rues et de quelques lieux-dits. Aujourd’hui, on y trouve mêlés des sites industriels côtoyant une campagne reposante, des maisons unifamiliales à côté de buildings, des habitations sociales et des résidences stylées. NOH est devenu un quartier plein de contrastes entre ville et campagne où il fait malgré tout bon vivre.

Ecrit par FRANS COOMANS (traduit en français par LOUIS CLAES)